La Kabylie Ancestrale !!

         

 Village Kabyle ancien,Perdu ou abandonné ?

 

A voir nos villages de loin, lorsqu’on traverse la vaste Kabylie, on dirait simplement qu’ils sont une partie intégrante des reliefs accidentés et montagneux qui les abritent. Ils sont là depuis très longtemps que la nature a fini par les adopter. Beaux comme les coraux sur les bijoux d’argent et la couleur rougeâtre des toits en tuiles donne un plus à la luxuriance herbue des lieux.

Quand on veut visiter l’un de ces villages kabyles anciens, on est pratiquement sûr d’accéder au lieu en montant à vous user le souffle. Est-ce une invitation à la partance vu que pour partir et quitter le hameau il suffit de descendre. Nos aïeux ont choisi la dureté de la vie à sa simplicité. Ils fuyaient les plaines fertiles pour se refugier dans ces flancs montagneux abruptes et austères. Ceux qui restent se résignent à se renier. Les hameaux collaient aux adrets comme des rochers figés et ce, peut-être pour de profiter gracieusement de la lumière du soleil à défaut de celle des hommes. Étaient–ils des gens maudits ? Eux qui ont toujours subi des invasions incessantes. Peut-être que oui ! Les fameux chemins qui montent dixit Dda mouloud Feraoun. Ils montent, ils montent à ne plus en finir dans un escarpement discontinu. Il fallait être doloriste pour venir s’agripper à ces endroits inhospitaliers.

On s’y rendant, on est vite attiré par la sobriété et l’étrangeté des lieux. Un étrange sentiment vous envahit tellement le silence est partout. Dans les dédales de ces fantomatiques villages en ruines, délaissés précipitamment il y n a pas longtemps, on entendrait presque le silence parler. Des regards invisibles nous percent le corps et nous font hérisser les poils. Les fantômes des anciens nous reprochent surement le fait d’être là, nous qui les avions abandonné. Un contact magnétique nous relie à plus loin dans le temps. Ce temps où ce champ de carcasses en pierres grouillait de monde. Au milieu de chacun de ces villages se dressent toujours, ou presque un arbre milliaire comme le témoin vivant d’une tragédie. Un frêle, un caroubier, un figuier ou un olivier est toujours là pour imposer une halte. A l’ombre des ces derniers, des millénaires durant, des conflits ont été réglés. Des réunions interminables se tenaient pour préparer tout et se préparer à tout. À travers le territoire d’Afrique du nord, ces zones montagnardes qui accueillaient les tribus amazighes disséminées un peu partout peuvent être comparées à des réserves humaines à ciel ouvert choisies volontairement par les autochtones afin de fuir les assauts ininterrompus d’envahisseurs, pour sauvegarder un peuple, une culture et un mode sociétal d’une disparition certaine. L’instinct de survie collective ! Aujourd’hui c’est le comble ! On fui ces conglomérats disparates comme pour tourner le dos à l’histoire. Au passé. Cela prouve peut être qu’on était forcer de s’y installer. Des camps de concentration pour les récalcitrants?

La promiscuité des habitions vous renvoie directement au mode de vie kabyle basé sur la solidarité et l’entraide. Est-ce la peur des envahisseurs successifs qui les ont délogé et chassé de leurs terres ? L’homogénéité et la simplicité du plan urbanistique renseignent sur les liens qui tissaient chaque clan à un autre. Il n’est pas rare de trouver un mur faisant partie de deux habitations limitrophes. Il rapprochait intimement les branches familiales. Il fallait être l’un prêt de l’autre pour parer à tous dangers pouvant venir de l’extérieur. Même les bêtes étaient logées dans un seul espace avec les hommes. C’était considéré comme un trésor. Le troupeau pourvoyait la famille en viande et le jardin en fruits et légumes. Tout est à portée de mains. Il ne fallait surtout pas s’éloigner. Quand on part, c’est le plus loin possible. La juxtaposition des maisons est un signe qui ne trompe pas. On s’agglutinait autour d’un lien fort. C’est comme un instinct animalier devant un danger. Les patriarches veillaient à la cohésion du groupe.

Pour le reste la vue est belle. Des cartes postales archéologiques ! Aux tuiles ocre qu’on retrouve sur toutes les maisons s’ajoutent l’uniformité des hauteurs. Aucune maison ne dépasse l’autre. La même distance sépare les gens du ciel (dieu) et de la terre (l’au-delà). Tous souhaitent rester unis ici et là bas. Chez les aïeux, la séparation est une épreuve insupportable. Ils restent attacher au sang et à la terre. On meurt pour l’honneur de la tribu. Le métissage est un sacrilège. Les relations matrimoniales se faisaient exclusivement entre la même entité. Quiconque ose se marier avec une étrangère à la communauté est un renégat. Implicitement il est exclu de sa communauté. Il subissait la honte du clan. Il s’est marié avec ta3rabt (une arabe), avec une tarumit (une européenne) !? Ah le bougre. On jetait l’anathème sur ceux qui osaient. Un repli sur soi salutaire ? Le sang ne se mêle pas disaient-ils.

Une fois sur place on remarque détails architecturaux bizarres. Les portes des maisonnettes sont bassement incrustées dans les murs donnant toutes sur une courette. On y accède par des huis étroits.

On baisse la tête à chaque fois qu’on accède à l’intérieur d’une maison. Est-ce un geste d’opprimés ? Peut- être ! La droiture du corps est réservée à la noblesse, aux conquérants et à centaines classes sociales. L’amazigh en général a cédé aux envahisseurs successifs. Il fait profil bas à présent. C’est un repli tactique pour éviter l’extinction de la race. Peut-être ! Les villages kabyles vu qu’ils sont implantés dans des endroits quasi inaccessibles ont offert un sursis à leurs occupants. C ‘est l’essentiel.

Pour terminer ce constat, nous appelons les autorités régionales à protéger ces endroits porteurs de messages plusieurs fois milliaires qui nous interpellent pour nous narrer notre cheminement dans un anachronisme biscornu à travers des siècles. Ces endroits salvateurs nous ont permis de traverser le temps pour arriver jusqu’ici. Leur préservation est vitale. Ces villages ont accompli leurs missions, à présent c’est à nous d’accomplir la notre en leur donnant une vie éternelle. Chacun de ces villages est un musée, il suffit juste de les requinquer et de les entretenir. De leur survie renaitra l’atavisme qui nous emportera très loin dans notre passé.

Par : Rabah Benamghar.

 



27/02/2010
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